La fête de l'huma
Ça s’est passé dans le TER. Au petit matin de septembre, gare St Charles à Marseille, le groupe, une vingtaine de personnes plus ou moins jeunes, mais jeunes, a pris place, direction Paris, la fête de l’Humanité. J’ai voulu m’asseoir à côté de Carole mais un grand black tout en muscles et tatoué sur le biceps m’a devancée.
Bonne perdante, j’ai trouvé place juste derrière eux, près de la fenêtre, sur un vieux siège au revêtement élimé, râpé, collant. Je ne suis pas restée seule longtemps, un garçon d’une vingtaine d’années, j’ai calculé à vue de nez qu’on avait à peu près le même âge, s’est installé sur le siège vacant à mes côtés.
— Laurent… Il a dit dans un sourire.
— Laurence, j’ai répondu, c’est rigolo, on a le même prénom.
Et puis dans un roulement lourd, fastidieux, le train a démarré. En TGV c’était plus cher, comme c’était le MJC (Mouvement des Jeunes Communistes) qui offrait le voyage, on allait pas poser des impératifs de confort et de gain de temps.
— Eh bien c’est parti ! a clamé Guillaume, le dirigeant de la section, avant de s’affaler dans son fauteuil.
J’ai regardé Laurent en faisant mine de m’intéresser aux propos de Guillaume. Grand, les cheveux noirs un peu fous, les yeux clairs, peut-être bleus, le jeans troué de circonstance, le tee-shirt à l’effigie du Che, le bras plutôt musclé. Faut croire que les hommes jeunes aiment se prouver que l’intérêt qu’une femme leur porte tient dans le gonflement sous la manche. Lui aussi m’a observée, mais bien plus franchement. De la tête aux pieds, sans se presser.
— Dis donc, ma voisine, t’en jettes, t’es mignonne !
Ben voyons, j’ai pensé, comme t’es sûr de toi. Moi je le sais que je suis bien gaulée et que j’ai une tête de salope sous mes longues mèches brunes. Alors ton compliment du dimanche… enfin, du samedi…
— Oh merci, j’ai répondu. Et j’ai pris un air timide pour lui faire croire que j’avais compris qu’à côté de moi trônait le roi du monde.
Du coup, ça lui a donné de l’assurance. Avant qu’il ne passe au plan d’attaque, j’ai eu le temps de constater qu’entre Carole et le grand black la conversation allait bon train.
Laurent ne m’a pas laissé le temps de saisir des bribes de ce qui se disait devant moi.
— Laurence, je dis sans doute une bêtise, mais j’ai l’impression qu’on se connaît… Où nous sommes-nous rencontrés ?
Je me suis dit qu’il manquait pas d’air le beau brun. C’est sûr qu’avec des cils pareils et des pupilles comme des agates… C’était quand même pas une raison pour déployer des plumes de paon et se la péter comme ça. Alors pour le troubler et je savais que je le troublerais, j’ai ôté mon petit pull et il a découvert mon tee-shirt noué au-dessus du ventre et mon piercing. La vache, ses yeux comme ils ont fait le parcours du pull enlevé jusqu’au nombril ! Ça lui a fait faire une minute de silence et j’ai apprécié cette petite victoire volée au guerrier de l’amour qu’il semblait être. J’ai su d’entrée de jeu à qui j’avais affaire, un serial lover, j’ai su aussi que je voudrais savoir quel goût avait ce garçon. On est salope dans l’âme ou on ne l’est pas. Ça risquait d’être long ce Marseille-Paris en TER et je n’avais emporté ni livre ni ouvrage genre crochet ou tricot…
C’était le genre devin qui perce les pensées parce qu’il a dit :
— J’ai pas prévu d’occupation et on n’est pas rendu… Et toi ?
Me suis demandée quel effet ça devait faire de poser des questions dans le vide vu que je prenais pas la peine de répondre. Mais j’ai souri, dans le vague. Et j’ai pris un regard de tragédienne, histoire de déstabiliser Laurent.
— C’est pas pour te flatter ma belle mais des avions de chasse comme toi, on en voit pas beaucoup dans le ciel…
Voilà, un comme lui quand ça commence, ça peut pas s’arrêter et pour emballer le tout il était d’une poésie… Malgré ce déballage inepte, j’avoue que son corps exerçait sur moi une attirance folle. Dommage, je m’étais imaginée que si je rencontrais quelqu’un d’intéressant pendant ce trajet, il aurait lu au moins le Manifeste de Marx.
Ça semblait pas le cas et il portait le Che sur le torse comme il aurait pu porter le logo d’une marque fashion. Le truc de circonstances. Je savais pas quoi faire de la petite laine chiffonnée entre mes doigts. Alors je l’ai posée sur son jeans. Je me suis étirée. J’ai regardé par la fenêtre.
Il a saisi à pleines mains le pull. Il l’a porté à son visage. Il l’a humé, fort. Puis abandonné sur son pantalon, à la place que j’avais choisie pour le vêtement. Me suis demandée à quel concert on aurait droit, là-bas, à la fête de l’Huma. Est-ce que ça serait à la hauteur de Lavilliers…
Laurent a pris ma main dans la sienne et l’a enfouie sous mon pull. Posée sur son sexe. Il a défait la braguette. Sa queue était chaude et charnue. Je l’ai empoignée, limite par automatisme, je voulais juger de la solidité du renflement. Dans ma main, nichée dans la paume, jouant contre mes doigts, elle prenait vie. C’était une histoire entre elle et moi. Elle devenait mon animal domestique. J’avais l’impression que c’était elle qui me caressait, qu’elle quémandait mon attention. Je n’avais pas à la dompter, elle était maîtrisée d’avance, offerte, acquise. Ça m’était bien égal qu’à l’autre bout d’elle les yeux bleus n’aient pas lu Karl Marx. Toute chaude, elle se mettait à danser, tendue, arrondie, parfaite. Une queue d’exception.
— Tu l’aimes, hein, ma bite, elle te plaît, pas vrai…
Pouvait pas s’empêcher de la ramener. J’avais pas envie qu’il la retire de mes mains, alors j’ai dit oui, oui, oui, je l’aime ta queue, je vais la prendre en bouche, la lécher, saliver dessus. J’ai dit ça très doucement, en le regardant dans les yeux, je sais pas si dans le wagon y en avait qui nous observaient, je pense que non, mais ça n’avait pas d’importance. J’ai vu passer la joie, la reconnaissance, dans son regard.
Mes doigts ont pris la forme d’un rond de serviette et avec un savoir-faire que je ne leur avais jamais connu auparavant, ils se sont mis à danser autour de la bête. Ma chair moite épousait cet animal prêt à se rendre d’un instant à l’autre. Le grand sauvage dans ma main petite sursautait, tremblait, se débattait. J’ai regardé le visage de Laurent et j’ai vu couler une larme le long de sa joue. Un pleur de bonheur. J’étais fière de moi. Alors j’ai astiqué son engin de plus belle, le geste énergique. Je me sentais frénétique.
Sous mon pantalon je portais le petit short rouge qui me sert pour le footing l’été sur la plage. Le short bordé de blanc sur les coutures, le short avec écrit sexy en grosses lettres sur le cul. Je me sentais puissante parce que je mouillais ma culotte et que ça débordait sur le short de coton. J’étais humide, ça collait et entre mes mains se trouvait le levier de vitesse d’une bien jolie machine.
Laurent s’est tourné vers moi. Il a posé sa bouche dans mon cou avec une délicatesse inattendue. Il a plaqué ses doigts entre mes cuisses et juste par la pression de cette main j’étais au bord de jouir. J’ai dégagé mon visage et je me suis inclinée. Ses doigts ne pouvaient plus exercer la même pression. J’ai repris le contrôle. Sa bite a tapé contre ma joue. Elle est venue se loger dans ma bouche et j’ai craché un gros flot de salive. Je l’ai sucée avec tout l’amour que je sais mettre dans ces moments-là. Il y avait la bite et moi. La bite et ma bouche. Laurent, Guillaume, Carole, le grand black, le groupe, je m’en foutais. C’était moi la plus belle fille du wagon, moi, la plus belle pute du Marseille-Paris. Je me sentais glorieuse de ça. J’y ai mis tant de cœur qu’il a éjaculé un monstrueux jet de sperme au fond de ma gorge. Et sans bruit. Sans le moindre râle. Juste les frissons et les soubresauts. J’ai avalé d’une traite. J’ai passé ma main pour essuyer ma bouche. Je me suis relevée. J’ai regardé par la fenêtre. Direct. Pas un regard, rien, pour lui.
On a laissé passer une dizaine de minutes comme ça. Je suis sûre qu’il y avait eu quelques voyeurs pour mater la scène. J’espère qu’ils en avaient eu mal à la queue d’envie.
Laurent s’est penché vers moi et il m’a dit qu’il avait envie de pisser, qu’il voulait que je vienne avec lui, pour le regarder et puis que si moi j’avais envie, il allait me regarder aussi. Il s’est levé et s’est dirigé vers la cabine de toilettes à l’arrière du wagon. Même pas une minute après lui, j’ai fait de même. Il faisait plus sombre à cet endroit du compartiment et on n’intéressait plus qui que ce soit. La suspicion nous concernant n’avait plus lieu d’être. Il est entré le premier et j’ai suivi.
On s’est serré afin de fermer la porte. Je me suis collée contre la paroi et il a déboutonné mon jeans. Il a passé ses mains sous le short et la culotte pour les faire glisser. Il y avait une cuvette, ce qui est rare dans ce genre de trains souvent équipés de vieux toilettes à la turque, plus hygiéniques mais pas très pratiques. Et puis c’était propre. J’ai eu l’idée de provoquer le grand garçon aux yeux clairs. Je me suis assise pour pisser. Il m’a regardée. Il m’a dit de ne pas m’essuyer. Il m’a dit de me relever. De mettre mon bon petit cul contre le mur. J’ai obéi. Il s’est agenouillé devant moi. D’abord j’ai senti sa respiration contre ma chatte glabre. Puis il a passé sa langue le long de ma fente. Une grosse langue gourmande. J’ai senti ses lèvres charnues prendre possession de mon bulbe suintant. J’ai écarté les cuisses parce que je voulais plus de sensations. Il lapait mon sexe, il avait lapé mes gouttes d’urine. Il a aspiré ma chatte tout entière et sans presque toucher mon clitoris, il m’a fait jouir. Je n’ai pas pu m’empêcher de gémir.
J’ai déchargé comme rarement dans ma vie. Tant bien que mal, je me suis réajustée.
Bien sûr, c’est le moment que Guillaume a choisi pour vouloir utiliser les lieux. Quand on a ouvert il attendait sagement derrière la porte. Laurent était gêné, l’embarras le faisait transpirer. Ça m’a agacée ce manque d’aplomb. Moi, je me suis pas démontée. J’ai regardé Laurent dans les yeux et je lui ai offert un sourire plein de promesses. Après tout, un chef, ça a des prérogatives. Avant d’entrer dans les toilettes, Guillaume s’est mordillé la lèvre supérieure, genre, c’est quand tu veux ma belle. Mais je voulais, ça tombait pile poil, on aurait tout loisir de combler le roi des révolutionnaires à la fête ou dans sa chambre d’hôtel ou sur le trajet retour. Lui, il aurait le choix.
On s’est remis à nos place. Devant, Carole s’était endormie et le grand black était perdu dans ses rêves. Je l’y aurais volontiers rejoint. Quelle sotte cette Carole. Un modèle si appétissant. Mais je me réservais désormais pour Guillaume. Je ne voulais pas me disperser trop. Laurent collait son bras contre le mien mais j’en avais rien à faire de son bras. Lui et moi c’était une histoire de fellation et de lèche qui allait s’arrêter là. À cet instant, j’étais juste la seule à le savoir. Il a dit que ça serait cool de recommencer à Paris. J’ai pas répondu.
Quand Guillaume a traversé à nouveau le wagon, j’ai regardé ses fesses et comment il marchait. C’était pas une gravure de mode mais il me plaisait. Il me plaisait davantage que mon voisin. Disons que lui je l’avais pas eu, pas encore. Disons qu’avec lui j’envisageais de coucher mais c’est sûr que dans une chambre d’hôtel par exemple, ça s’y prête plus facilement que dans un compartiment de TER !
J’ai fermé les yeux. On allait pas tarder à arriver à Paris. J’ai pensé à mon petit ami qui n’était pas du tout de gauche, lui, qui avait une belle situation, qui avait toute confiance en moi et viendrait me chercher, sur le quai de la gare St Charles, à la fin du week-end. J’ai pensé à Guillaume et j’ai espéré très fort qu’il m’invite le soir dans son lit. Sinon je dormirais sous une grande tente prévue pour nous recevoir et dans mon sac de couchage et ça j’en avais vraiment pas envie. Guillaume, en dignitaire, avait une chambre réservée, je le savais. J’ai pensé à Che Guevara et j’ai déploré qu’il soit contre le torse de Laurent parce que je les trouvais pas assortis.
Peut-être que je me trompais mais j’en doute. Je me suis dit qu’il me faudrait trouver une phrase inoubliable à dire à Laurent en descendant du train. Le temps n’efface pas les phrases et avec le temps il oublierait le goût de ma fente. Bonne ou mauvaise, j’ai toujours eu le sens de la formule. J’ai pensé qu’en quittant le train, quand le groupe à nouveau se mélangerait, Laurent me dirait une phrase du genre :
— À plus tard ma coquine, ma terrible Laurence… On se retrouve ce soir…
Je me suis dit qu’il y avait pas trente-six mille mots qui feraient mouche, qui seraient parfaits dans ce contexte, j’ai pensé que je lui répondrais alors :
— Hasta siempre, Laurent…
Histoire de botter en touche et de passer à autre chose…
***
Aline Tosca est l'une de mes auteurs érotiques préférées. C'est bien simple, elle sait donner un caractère intensément érotique aux situations les plus banales. J'ai dévoré le Sexe Gourmand, son recueil de nouvelles publié chez Terriciae.
***
La semaine prochaine, nous répondrons à cette question éminemment philosophique : "Les auteurs de littérature érotique sont-ils des obsédés sexuels?"
Laissez-vous séduire par les porn modèles de X-art, partenaire de Nouvelles Erotiques.